Trouble de l'usage de substances - Généralités
Dernière modification : 04.10.2021
L’addiction est un processus par lequel un comportement, pouvant permettre à la fois une production de plaisir et d’écarter ou d’atténuer une sensation de malaise interne, est employé d’une façon caractérisée par « l’impossibilité répétée de contrôler ce comportement et sa poursuite en dépit de la connaissance de ses conséquences négatives ».
Sémiologie
Le comportement peut être la consommation de substances psychoactives (alcool, tabac, opiacés, médicaments, etc.), : on parle d’addiction à une substance.
Il existe aussi des addictions sans substance ou addictions comportementales (jeu de hasard et d’argent, jeux vidéo, sexe, internet, achats, exercice physique, troubles des conduites alimentaires).
Voir aussi les fiches par substance :
- Alcool
- Tabac
- Cannabis
- Cocaïne
- Amphétamines
- Opiacés
- Drogues de synthèse
- Psychotropes (dont benzodiazépines).
Étiologie
L’addiction perturbe notre dépendance naturelle en ce qu’elle touche la régulation désir / manque et les drogues interfèrent avec ces mécanismes de dépendance naturelle. Car si dans les addictions comportementales il y a perte du contrôle des mécanismes naturels alternant « recherche du plaisir - évitement de souffrance » et de gestion des émotions positives et négatives, dans les addictions aux substances, les drogues viennent se greffer sur les voies du plaisir et constituent des leurres pharmacologiques qui prennent la place des neuromédiateurs naturels.
Ainsi les addictions perturbent le système de récompense.
Les plaisirs naturels et les drogues addictives augmentent la dopamine (DA) dans une région cérébrale appelée le nucleus accumbens (appartenant au système limbique).
Les neurones à dopamine sont régulés par des substances endogènes (endorphines, endocannabinoïdes, GABA, …) qui par la stimulation de récepteurs augmentent la dopamine dans le but d’augmenter les motivations à reproduire les sensations plaisantes et le bien-être du sujet. Plus un objet ou une situation est récompensant, plus il est mis en mémoire pour être recherché et répété. Les substances addictives en se fixant sur les récepteurs augmentent considérablement la dopamine, renforçant le système de récompense qui s’emballe, perdant le rétrocontrôle entre cortex, mémoire et système de récompense.
Tout est fait pour que la dépendance s’installe.
Les concentrations de dopamine très hautes et durables favorisent une récompense surpuissante entrainant la perte de la satiété avec un haut niveau d’appétence jamais totalement satisfait. Le sujet n’a plus qu’un seul but : éviter la souffrance. Ainsi devant l’afflux massif de dopamine, le système de récompense s’adapte en diminuant le nombre de récepteurs post-synaptique qui impose d’augmenter les doses pour obtenir les mêmes effets (phénomène de tolérance ) et lorsqu’il n’y a plus de consommation de substance ou un arrêt du comportement, le sujet ressent du manque
Le modèle de référence qui sous-tend le concept des comportements addictifs et leur facteur de gravité est un modèle biologique psychologique et social. En effet, les comportements addictifs ne peuvent se concevoir sous le seul angle du produit, mais doivent aussi être considérés sous celui de la personnalité dans son contexte socio-environnemental.
Pour paraphraser Claude Olievenstein, nous pouvons dire que l’addiction est l’affaire d’une personne qui rencontre un produit ou un comportement dans un contexte socio-environnemental. Ainsi les facteurs de risque et de gravité d’une addiction peuvent être liés à la substance, à la personnalité et à l’environnement.
Formes cliniques
Il existe un continuum entre la consommation et la dépendance sous l’influence de nombreux facteurs. On distingue l’usage, l’ usage à risque , l’ usage nocif et la dépendance.
Si l’usage est la consommation usuelle d’un produit ou la réalisation d’un comportement sans qu’il ne présente un caractère pathologique, l’ usage à risque est défini par une consommation de substance pendant 12 mois entrainant au moins une des conséquences psychosociales suivantes : incapacité à remplir les obligations majeures (maison, travail, école), prise de risques (ex. conduite en état d’ivresse), transgression de la loi (problèmes judiciaires) ou encore poursuite de la consommation malgré des problèmes interpersonnels ou sociaux (ex. : disputes, bagarres)
L’ usage nocif est la consommation répétée induisant des dommages physiques, psychoaffectifs ou sociaux pour le sujet lui-même ou pour son environnement proche ou éloigné sans atteindre le seuil de la dépendance physique ou psychique et dont le caractère pathologique est défini à la fois par la répétition de la consommation et le constat des dommages induits.
Enfin, la dépendance est l’impossibilité de s’abstenir de consommer. Elle associe une dépendance physique qui se traduit par un phénomène de tolérance (il faut augmenter les doses pour obtenir les mêmes effets) et un syndrome de sevrage (signes de manque physiques et psychiques) et par une dépendance psychique (encore appelé « craving ») qui se traduite par le besoin irrépressible de consommer.
Évaluation
Les facteurs liés à la consommation ou au comportement sont :
- Le type de produit
- La précocité de la consommation
- La consommation à visée auto-thérapeutique
- Les modalités de consommation
- Les conduites d’excès
- Le cumul des consommations
- La répétition des consommations à risque
Les facteurs de risque individuels :
- Génétiques
- La présence de traits de personnalité
- La présence d’une maladie psychiatrique
Les facteurs de risques environnementaux :
- Facteurs familiaux
- Facteurs sociaux
- Imitation des copains et pairs
- Marginalité
Le dépistage de la consommation de substances doit au minimum comporter :
- un dépistage des consommations d'alcool et de tabac,
- un dépistage d'autres drogues chez les populations à risque.
L’adolescence constitue une période de vulnérabilité particulière vis-à-vis des addictions. Elle nécessite une vigilance et une surveillance régulières de l’usage de substances et une intervention rapide en cas de mésusage.
Conduite à tenir
Devant tout usage à risque, nocif ou dépendance il convient :
- de favoriser l'alliance thérapeutique, d'impliquer l'entourage si possible,
- de faire une intervention brève pour rappel des risques de l'usage,
- d'informer sur les ressources et lieux d'aides disponibles,
- de prendre en charge les comorbidités psychiatriques et non psychiatriques.
La stratégie est celle de la réduction des risques et des dommages.
Les interventions psychosociales dans le trouble d'usage de substance consistent généralement en :
- un ou des entretiens motivationnels.
- une thérapie cognitive et comportementale pour la prévention des reprises du mésusage .
Quand orienter vers un addictologue ?
- besoin d'aide au diagnostic,
- sévérité ou complexité du tableau clinique,
- nécessité d'une prise en charge pluridisciplinaire (comorbidité ou besoin de soutien pour populations particulières, jeunes),
- réponse partielle ou absence de réponse au traitement.
Références
AESP, CNUP, & CUNEA. (2021). Référentiel de Psychiatrie et Addictologie (3e édition conforme au nouveau programme) Psychiatrie de l’adulte. Psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. Addictologie (Presses Universitaires François Rabelais).
Ressources
DEPistage de consommation problématique d’alcool et de drogue chez les ADOlescents (DEP-ADO)
La DEP-ADO permet le dépistage de consommation problématique d'alcool et de drogue chez les adolescents de 11 à 18 ans.
Application Tabac info Service
Application d'aide au sevrage du tabac (questionnaires, journal, exercices) du Ministère des Solidarités et de la Santé, de l’Assurance Maladie et de Santé publique France.
Try Dry
Application d'aide au sevrage d'alcool (journal, monitoring, psychoéducation) par Alcool Change au Royaume-Uni, maintenant disponible en français.
Stop-cannabis
Application d'aide au sevrage de cannabis (questionnaires, exercices, monitoring) par l'université de Genève.
Addict'aides
Site internet de ressources et auto-évaluation pour les addictions issu du Fonds Addict'aides.
Test de Fagerström
Le test de Fagerström est un test qui permet de quantifier le niveau de dépendance du patient au tabac.
Questionnaire AUDIT (Alcohol Use Disorders Identification Test)
Test simple en 10 questions élaboré par l'OMS pour le dépistage des troubles de l'usage d'alcool.
Echelle CAST (Cannabis Abuse Screening Test)
L'échelle CAST est une échelle de repérage des consommations problématiques de cannabis en 6 items.